PYRÉNÉES

PYRÉNÉES
PYRÉNÉES

La chaîne des Pyrénées s’étend sur près de 450 km, du golfe de Gascogne au golfe du Lion; mais c’est de la basse Provence aux chaînons de la région espagnole de Santander que se développe l’édifice pyrénéen, au sens géologique du terme. Sur plus de 900 km, on observe en effet ici, schématiquement allongé d’ouest en est, un même faisceau montagneux qui associe des terrains mésozoïques et cénozoïques à des formations anciennes. Ces dernières étaient déjà agencées, au moins depuis l’orogenèse varisque (hercynienne), en un substrat plissé à caractère de croûte continentale. Ce substrat affleure en un certain nombre de massifs «anciens» pyrénéens; il constitue, de part et d’autre des Pyrénées, le tréfonds de bassins sédimentaires (Aquitaine, Èbre) qui relèvent des cratons européen et ibérique. Vers l’est, le devenir de l’édifice pyrénéen qui est partiellement repris dans le système plissé alpin est difficile à suivre sous les eaux de la Méditerranée nord-occidentale. Vers l’ouest, cet édifice se prolonge dans l’étroit plateau continental nord-espagnol; il y est sectionné de façon abrupte et presque en ligne droite, sur sa marge nord, par les profondeurs océaniques du golfe de Gascogne.

Les Pyrénées au sens strict englobent des milieux géographiques contrastés. Du point de vue physique, on oppose facilement les Pyrénées méditerranéennes sèches (versant sud drainé par les affluents de l’Èbre; partie orientale: bassins de l’Aude, de la Têt, du Tech, du Ter) aux Pyrénées atlantiques humides (versant nord drainé par les petites rivières du Guipúzcoa, l’Adour et la Garonne). Du point de vue social, les Pyrénées ressortissent à deux économies différentes: celle de l’Espagne au développement rapide mais tardif, celle de la France, industrialisée plus tôt mais pour qui les Pyrénées sont à huit cents kilomètres des foyers d’animation et de décision.

1. Géologie

Principales unités

Dans les Pyrénées proprement dites (fig. 1 et 2) un vaste affleurement médian de terrains anciens, jalonné par la plupart des reliefs frontaliers, constitue la zone axiale . Des formations précambriennes et paléozoïques sont associées ici, depuis l’orogenèse varisque, en un ensemble plissé, assez largement métamorphisé, et recoupé de corps plutoniques. Cette haute chaîne primaire est effondrée, à l’est, sous les bassins néogènes et quaternaires catalans et, au-delà, sous la Méditerranée. Vers l’ouest elle s’ennoie, en haut Béarn, sous un revêtement discordant de terrains postvarisques; elle n’apparaît plus alors en affleurement que de façon discontinue, dans certains des massifs primaires basques.

Les reliefs de cette zone axiale sont, en profondeur, compensés par un épaississement de la croûte; par exemple sous forme d’une «racine» de quelque 50 km sous le massif de la Maladetta. De ce fait, une nette anomalie négative de pesanteur apparaît dans une grande partie de la haute chaîne primaire. Ces particularités s’estompent, toutefois, dans les Pyrénées de l’Est.

La bordure méridionale de la zone axiale, sur le versant espagnol, a été généralement le siège d’amples mouvements tangentiels dirigés du nord vers le sud, par-dessus le revêtement sédimentaire postvarisque. Ces mouvements, d’âge alpin, ont également concerné les séries mésozoïques et cénozoïques de la zone sud-pyrénéenne . Des décollements d’importance variable ont facilité ces déplacements qui vont s’amortir au voisinage de la dépression de l’Èbre, dans un «front de chevauchement sud-pyrénéen» que jalonnent écailles et plis des sierras marginales catalanes et aragonaises. L’avant-pays plissé (autochtone relatif) n’est donc observable que sous les unités décollées et charriées dont il vient d’être question: cela se limite à la bordure même de la zone axiale en haut Aragon et surtout en Catalogne; cela correspond aussi au revers méridional de la zone des sierras, sur les marges du bassin de l’Èbre.

On s’accorde à considérer que l’ensemble des zones précitées relève de la partie septentrionale du craton («plaque») ibérique, et que c’est au nord de ce dernier (et de ces zones) que se situent les dispositifs caractéristiques de la suture pyrénéenne entre Europe et Ibérie (fig. 1 et 2).

Un système de cassures de direction générale N 110 (faille nord-pyrénéenne ) délimite assez bien la zone axiale sur sa bordure septentrionale, dans les Pyrénées orientales et centrales. Plus à l’ouest, le tracé de cet accident, apparemment décroché vers le sud à hauteur des massifs anciens du Pays basque, peut être hypothétiquement suivi au sud du dispositif de la nappe des marbres et de l’arc plissé basque, en territoire espagnol, puis, plus à l’ouest, le long de la côte de la province de Santander (fig. 1).

C’est au nord de cet «accident» que l’on peut situer la zone nord-pyrénéenne ; il s’y juxtapose en affleurement des massifs anciens, noyaux amygdalaires du bâti varisque globalement allongés ouest-nord-ouest – est-sud-est, et des terrains plus récents, pour l’essentiel mésozoïques, organisés en faisceaux plissés suivant la même direction générale. Ce domaine est véritablement la partie la plus significative des Pyrénées alpines. On y relève la présence de séries sédimentaires mésozoïques plus complètes, souvent plus épaisses, que celles du versant méridional; des dépôts à caractère de flysch y apparaissent à partir du Crétacé moyen, essentiellement dans les Pyrénées occidentales et centrales. Un métamorphisme thermique a affecté ces terrains, au cours du Crétacé, principalement au voisinage de la faille nord-pyrénéenne. S’insèrent ici, sous forme de petits massifs de gneiss granulitiques et de péridotites (lherzolites) des témoins exigus de la croûte profonde ou même du manteau supérieur; corrélativement, on relève (sauf dans les Pyrénées de l’Est) de nettes anomalies positives de pesanteur. Ce dernier point s’expliquerait apparemment par une brusque remontée du Moho au nord de la faille nord-pyrénéenne, qui serait donc une structure profonde et, peut-être, à fort pendage.

Des Corbières méridionales au bas Adour, un «front de chevauchement nord-pyrénéen» marque la limite septentrionale de la zone nord-pyrénéenne. Il s’agit en fait d’une série d’accidents longitudinaux parfois recoupés de décrochements transverses subméridiens. Ces dispositifs sont largement chevauchants vers le nord. Ils trouvent un prolongement dans les déplacements tangentiels, à caractère épidermique, qui ont affecté les séries mésozoïques des Corbières orientales et du bas Languedoc, en direction de l’avant-pays. Ils peuvent être suivis sous la mer, dans le golfe de Gascogne, sur le versant méridional du gouf de Capbreton, jusqu’au nord de Bilbao (fig. 1).

L’avant-pays plissé septentrional montre surtout, à l’affleurement, des terrains du Crétacé supérieur et de l’Éocène, ordonnés en plis relativement simples, de direction ouest-nord-ouest - est-sud-est, qui traduisent mal la complexité des structures profondes (diapirs triasiques, chevauchements). Ces déformations s’atténuent vers l’Aquitaine et sous le remplissage sédimentaire de ce bassin: ici se sont accumulées des molasses syn- et postorogéniques, dont les plus anciennes, comme aux marges du bassin de l’Èbre, sont encore plissées au voisinage de la chaîne. Le tréfonds ancien, varisque, n’apparaît plus qu’à l’est de la vallée de l’Aude, dans le demi-horst complexe du massif de Mouthoumet.

Évolution stratigraphique et tectonique

L’évolution de l’édifice pyrénéen, au cours des temps géologiques, peut être suivie, dans ses grandes lignes, au travers de l’évocation des terrains qui constituent cette chaîne (fig. 3).

Histoire anté-alpine

L’analyse structurale et la pétrologie ont permis de déceler dans certaines culminations métamorphiques de la zone axiale et du domaine nord-pyrénéen la présence de vestiges du Précambrien. Ainsi ont été mis en évidence – ce qu’ont localement confirmé des datations radiométriques – des granites et des structures tectoniques antépaléozoïques, au sein de segments d’un vieux socle repris par les déformations et le métamorphisme hercyniens (Canigou, massif de l’Agly, etc.).

Les terrains du Paléozoïque inférieur se présentent en de puissants ensembles presque totalement azoïques, de nature essentiellement pélitico-gréseuse, et souvent affectés par le métamorphisme varisque. S’y intercalent, surtout vers la base, des formations carbonatées et, à plusieurs niveaux, des témoins de manifestations volcaniques. Ces dernières, associées à des accumulations conglomératiques et à des calcaires à faunes benthiques, à la fin de l’Ordovicien, témoignent à cette époque d’une activité géodynamique que l’on peut rapprocher de manifestations précoces du cycle orogénique calédonien.

Leur succédèrent des dépôts ampéliteux riches en graptolites (Silurien s.l.), avant que le Dévonien et le Carbonifère inférieur ne voient l’enchaînement de séries sédimentaires marines et fossilifères, parfois très diversifiées, que viendront clore, en milieu paralique, les puissants épandages détritiques synorogéniques du Culm, flyschs annonciateurs de l’orogenèse varisque.

Multiples et complexes furent, dans les Pyrénées, les phénomènes profonds relevant de cette orogenèse. On peut y ranger les raccourcissements qui engendrèrent des successions et superpositions de plis souvent accompagnées de schistosité. Les séries paléozoïques et leur substrat précambrien furent, dans le même temps, modifiées par un métamorphisme général de type «haute température-basse pression». L’anatexie affecta localement les gneiss du socle précambrien, comme une certaine frange des micaschistes de leur revêtement. Formés essentiellement de roches granitiques, parfois associées à des roches plus basiques, des corps plutoniques se sont hissés à divers niveaux de l’édifice hercynien: corps diffus relativement profonds, liés aux migmatites, ou corps bien circonscrits, intrusifs jusque dans certaines structures plissées du Paléozoïque récent, lors de l’élaboration de ces dernières.

Enfin une fracturation de l’ensemble, apparemment esquissée de façon précoce au cours des temps paléozoïques, s’est accusée vers la fin de l’orogenèse varisque ; ainsi sont nés divers systèmes de cassures, parmi lesquels des accidents longitudinaux, de direction générale ouest-nord-ouest - est-sud-est, dont la «faille nord-pyrénéenne» serait un exemple. Le rôle de ces cassures sera déterminant par la suite, dans l’évolution alpine de la chaîne (cf. infra ).

La discordance hercynienne elle-même, traduction stratigraphique de cette orogenèse, se place au-dessus du Westphalien inférieur, et sous le Stéphanien (ou, exceptionnellement, sous le Westphalien supérieur) datés par des végétaux fossiles.

Histoire alpine

Une série allant du Westphalien terminal au Trias inférieur peut être considérée comme représentant l’ensemble des molasses posthercyniennes; des formations détritiques limniques, parfois intercalées de charbon, puis des accumulations de «grès rouges», à rares restes végétaux, traduisent le démantèlement subaérien des reliefs hercyniens encore instables. Les systèmes de fractures varisques jouèrent un rôle important dans la distribution de ces sédiments détritiques. Ils ont joué, au même moment, un rôle également important dans des venues volcaniques successives (séries calco-alcalines de l’Ossau; séries basaltiques basques). Tout cela s’inscrivait déjà dans le cadre du jeu décrochant du bloc ibérique par rapport au bloc européen; c’était un prélude à l’histoire alpine de ces régions.

Du Trias moyen au Jurassique supérieur, les séries sédimentaires sont de caractéristiques assez comparables si l’on considère les deux versants de la chaîne actuelle. C’est avec le Trias que se sont mises en place dans les Pyrénées et en Aquitaine des dolerites tholeiitiques (ophites) dont la venue accompagna l’ouverture de certains systèmes de fractures sur ce vaste domaine en distension, alors intéressé par le dépôt de séries laguno-marines épicontinentales. Par la suite, ce sont calcaires, marnes, dolomies, à faunes marines ou saumâtres, qui prédominent dans des ensembles sédimentaires répartis sur de larges aires inégalement subsidentes, parfois exondées; le jeu de fractures subméridiennes et/ou obliques sur la direction de la chaîne actuelle semble avoir contrôlé ce dispositif et ces variations.

Avec le Jurassique terminal et le Crétacé inférieur s’établirent des conditions nouvelles sur le domaine pyrénéen, alors même que s’amorçaient les mouvements d’ouverture océanique du golfe de Gascogne. À côté de régions émergées, où se formèrent des bauxites sous climat férallitisant (aux dépens de séries argilo-marneuses), s’accumulaient des sédiments marins de plate-forme, tels que dolomies, ou calcaires à algues, foraminifères et rudistes (calcaires dits «urgoniens», par exemple).

La configuration initiale des bassins marins de l’époque n’est pas de reconstitution aisée; elle relevait assurément de la superposition de divers systèmes de fractures (longitudinaux et transverses) dans un domaine cratonique en distension.

À l’aube du Crétacé supérieur s’installe, de façon très tranchée, une nette opposition entre deux ensembles. Des séries carbonatées de plate-forme, d’épaisseur relativement réduite, recouvrirent sur de larges surfaces la partie septentrionale du bloc ibérique (zone axiale, zone sud-pyrénéenne) alors remise en eau en différents épisodes.

Dans le même temps, l’accumulation de flyschs en domaine nord-pyrénéen témoigne de l’installation d’un sillon est-ouest profond, activement subsident, dont la morphologie se trouvait définie par le jeu de systèmes de fractures déjà évoqués. Ce sillon, ouvert sur le domaine atlantique, ne dépassait guère vers l’est le méridien de l’Aude. Il se trouvait flanqué, sur sa marge septentrionale, par le domaine relativement stable de la plate-forme aquitaine. Son substrat paraît n’avoir été formé que de croûte continentale amincie.

La déchirure intracratonique ainsi accusée vers la fin de l’Albien sera suivie de diverses phases de déformation conduisant à l’apparition de schistosités et de plusieurs discordances, au cours du Crétacé supérieur. Le resserrement du sillon nord-pyrénéen et le soulèvement du bourrelet bordier du craton ibérique vont alors rejeter progressivement vers l’avant-pays septentrional les axes de subsidence et les flyschs correspondants.

C’est durant cette même période que se manifesta un métamorphisme «pyrénéen», caractérisé par un flux thermique élevé, sous faible pression. Sous sa forme la plus significative, il se traduisit par des néogenèses à biotite, diopside, scapolite; cet épisode a fait l’objet de datations radiométriques qui le situent dans l’Albien en ce qui concerne la zone nord-pyrénéenne orientale, et dans le Campanien au Pays basque espagnol (nappe des marbres); mais des manifestations plus récentes, moins vigoureuses, de ce métamorphisme, sont souvent évoquées (limite Crétacé-Éocène?).

Localisé le plus souvent à proximité de la faille nord-pyrénéenne, ce métamorphisme est ainsi en relation (dans l’espace et le temps?) avec la mise en place de divers petits massifs de gneiss granulitiques et de lherzolites formés, d’après leurs constituants, dans des parties très profondes de la croûte, ou même dans le manteau supérieur.

Le rôle des fractures crustales fut déterminant dans toute cette dynamique nord-pyrénéenne au Crétacé supérieur. On doit encore l’évoquer à propos de la venue en surface de divers cortèges de roches magmatiques alcalines. Ce phénomène (Albien-Sénonien) a donné en domaine nord-pyrénéen, surtout dans les Pyrénées occidentales, des épanchements sous-marins de laves basaltiques, ainsi que des intrusions variées dans les terrains crétacés de Béarn et Bigorre.

Les couches de passage du Crétacé à l’Éocène soulignent, d’une autre manière, les différences souvent relevées entre les parties occidentale et orientale de la chaîne. Tandis que persistaient, à l’ouest, des dépôts marins de plate-forme et même de sillon subsident, les régions orientales étaient le siège d’épandages alluviaux, de dépôts palustres ou subaériens, dont les séries «garumniennes» peuvent donner un exemple (fig. 3). C’est à ce moment, en effet, qu’une phase de déformation (serrage) et soulèvement vient d’affecter les Pyrénées de l’Est.

Les terrains de l’Éocène, sous forme de calcaires, marnes, grès à foraminifères et faunes benthiques, traduisent encore, dans l’ouest de la chaîne, la poursuite d’une sédimentation marine dans deux bassins subsidents approximativement symétriques au nord et au sud des reliefs actuels. Plus à l’est, sur le versant français par exemple, ces couches éocènes, en séries peu épaisses et aux faciès très changeants, permettent de suivre plusieurs brefs épisodes de transgression et de régression, vers le Languedoc. Les épandages conglomératiques y deviennent abondants, puis prédominants vers la fin de l’Ilerdien et au Cuisien.

Alors s’amorce, en effet, une phase majeure de surrection et de déformation. Celle-ci, dans l’avant-pays septentrional, va encore impliquer les séries conglomératiques éocènes (poudingue de Palassou) sous un Éocène terminal discordant. De même, sur le versant sud de la chaîne, en Catalogne, des formations conglomératiques plissées ont pu être datées du Lutétien supérieur-Bartonien. Elles se trouvent recouvertes en discordance par des assises à faunes continentales de l’Éocène terminal.

Cette phase orogénique «majeure» s’accompagna d’amples déplacements tangentiels vers le nord (sur le versant français) et vers le sud (sur le versant espagnol), de part et d’autre de l’axe de la chaîne, mais de façon non symétrique (fig. 2). Dans ces mouvements se trouvèrent impliqués aussi bien les séries mésozoïques et éocènes que de larges segments du bâti varisque; ces derniers furent ainsi mobilisés le long de surfaces de discontinuité majeures qui les définissaient depuis le Paléozoïque, mais ils furent aussi, très souvent, intimement déformés dans cette évolution alpine, en fonction de leurs hétérogénéités et de leur anisotropie.

D’autres phases orogéniques plus récentes et de moindres conséquences en ce qui concerne l’architecture fondamentale des Pyrénées ont contribué à donner à la chaîne son visage actuel.

Par exemple, en bordure de la dépression de l’Èbre, à hauteur et au sud des sierras marginales, l’Oligocène plissé est surmonté en discordance par du Miocène détritique, continental, sensiblement horizontal.

Durant tout le Miocène, les accumulations molassiques dans les bassins bordiers comme l’Aquitaine vont être alimentées par le travail de l’érosion sur la chaîne. Au Pliocène, une nouvelle phase de rajeunissement nourrira de nouveaux épandages de piémont (formation de Lannemezan). Dans les limites de la chaîne actuelle, des terrains néogènes se sont trouvés conservés au sein de petits fossés effondrés (Cerdagne), parfois envahis par la mer en bordure de la Méditerranée (fossés de l’Ampurdan et du Roussillon, à faunes pliocènes). Le rejeu de cassures depuis longtemps apparues dans l’édifice a été, à ce titre encore, déterminant. On lui doit également les émissions magmatiques dont témoignent alors les appareils et coulées volcaniques de la Catalogne orientale (région d’Olot).

Modèles rendant compte de la formation des Pyrénées

À l’issue d’une brève présentation des caractéristiques géologiques de la chaîne des Pyrénées, il convient de s’interroger, dans la perspective générale de la mobilité des plaques de lithosphère, sur les modèles qui peuvent être élaborés pour rendre compte au mieux de l’histoire de cet édifice montagneux.

Ces modèles doivent évidemment prendre en compte ce qui est connu de la géologie pyrénéenne: ils doivent être compatibles avec les données stratigraphiques, structurales, pétrologiques, accumulées depuis des décennies. Ils doivent être également compatibles avec les données géophysiques obtenues plus récemment en ce qui concerne la configuration profonde de la croûte et de la limite croûte-manteau, ou encore la distribution des anomalies gravimétriques et magnétométriques.

Mais ces modèles doivent également intégrer ce qui est acquis à propos des domaines avoisinants. Cela concerne, en l’occurrence, en premier lieu, les blocs continentaux d’Europe occidentale et d’Ibérie. Les données du paléomagnétisme montrent que cette dernière a subi, par rapport à l’Europe, une rotation de quelque 35 degrés en sens contraire des aiguilles d’une montre, depuis le Trias.

Ce déplacement rotationnel de l’Ibérie paraît logiquement lié à l’«ouverture» du fond océanique du golfe de Gascogne, ouverture dont les péripéties et la chronologie peuvent être reconstituées grâce aux progrès de la géologie sous-marine, mais aussi et surtout grâce à la géophysique qui parvient à suivre la création et l’expansion de la croûte océanique.

Pour en revenir aux modèles proposés, on peut constater en schématisant qu’ils relèvent de trois types d’interprétation.

La distension de la croûte continentale, entre le Trias et le Crétacé, aurait engendré une sorte de «rift » continental , plus ou moins directement ouvert sur le golfe de Gascogne en voie de création. Ce rift se serait aligné sur la partie la plus interne de la zone nord-pyrénéenne, et son tracé se serait trouvé décalé en plusieurs endroits par des accidents transverses à valeur de faille transformante d’orientation initiale proche de nord-est sud-ouest. À la suite de la rotation de l’Ibérie et du serrage du rift, générateurs des déformations «alpines» à partir du Crétacé moyen, ces anciennes fractures transformantes définissent les tronçons majeurs de la chaîne actuelle. Dans ce modèle, tout ce qui est au sud de la zone interne appartiendrait logiquement au versant ibérique; tout ce qui est au nord (l’essentiel de la zone nord-pyrénéenne) appartiendrait au versant «aquitain» du rift. Il y aurait similitude de faciès entre les séries mésozoïques, suivant les divers tronçons, de part et d’autre de la haute chaîne primaire (P. Souquet et al., 1977; fig. 4 a).

Un autre modèle attribue à la faille nord -pyrénéenne un rôle majeur, qui est celui d’un ample accident décrochant , à valeur de faille transformante, le long duquel se serait effectué le glissement de l’Ibérie, autour d’un pôle de rotation primitivement situé au nord de la France et qui, progressivement, serait descendu vers le sud: c’est à la fin de la rotation, au Crétacé terminal, que ce mouvement aurait ainsi conduit à une collision de l’Ibérie et de l’Europe, engendrant un serrage qui aurait alors commencé dans les Pyrénées de l’Est. Le coulissement sénestre correspondant serait de l’ordre de plusieurs centaines de kilomètres. Il pourrait s’être localisé soit sur le tracé même de la faille nord-pyrénéenne, soit sur toute l’étendue d’une zone transformante parallèle à celle-ci (X. Le Pichon; P. Choukroune, 1976; J.-C. Soula, 1982; fig. 4 b).

Les analogies entre la marge continentale sud-armoricaine et l’Aquitaine, d’une part, et entre la marge nord-asturienne, l’arc plissé basque et la zone nord-pyrénéenne, d’autre part, peuvent être soulignées. Les Pyrénées et l’Aquitaine représenteraient deux marges continentales fossiles juxtaposées et même superposées à la suite du rapprochement, à l’Éocène, de l’Ibérie et de l’Europe, et de la subduction, sous le craton ibérique, du bassin profond qui les séparait. Cette collision aurait arrêté le mouvement de convergence des deux plaques, préservant de la même façon une partie des fonds océaniques du golfe de Gascogne, antérieurement créés. Sinon aurait été érigé un prolongement des Pyrénées dont les reliefs (asturiens) domineraient la plate-forme armoricaine, comme ceux des Pyrénées s’élèvent aujourd’hui au-dessus de l’Aquitaine (G. Boillot, 1980; fig. 4 c).

2. Les milieux physiques

Les Pyrénées humides comprennent tout le versant nord à l’ouest de la vallée de l’Ariège. Elles portent un manteau végétal continu qui ne s’ouvre que sur les hauts sommets au-dessus de 2 500 m. L’étage collinéen de chênaies avec châtaigniers est surmonté par les hêtraies de l’étage montagnard dans lesquelles apparaît le sapin à l’est de la vallée d’Aspe. Les derniers arbres en altitude sont les pins à crochets, les pins sylvestres ne peuplant que les fonds de quelques vallées plus sèches (Aure, Aran). Cette végétation ombrophile bénéficie de précipitations abondantes, plus de 3 m par an autour du pic d’Anie, mais le manteau neigeux est irrégulier et fluctuant au cours de l’hiver à cause de l’altitude modérée et de la basse latitude (430 N.). Les glaciers pyrénéens sont donc petits et peu nombreux (Balaïtous, 3 146 m; Vignemale, 3 298 m; massif de Gavarnie; Gours Blancs; Maladetta, 3 410 m). Mais les débits spécifiques des rivières sont abondants (de 35 à 45 l/s/km2) et réguliers, les hautes eaux de printemps totalisant la fusion nivale et les pluies maximales d’avril-mai.

L’englacement quaternaire a été beaucoup plus étendu: il a marqué de petits sommets du Pays basque (Ahadi, 1 453 m), modelé en cirques aujourd’hui lacustres les Pyrénées centrales, élargi quelques belles auges (bas Ossau, vallée d’Aure, val d’Aran, val d’Ariège) et laissé ses moraines en contact avec le piémont (Arudy, Lourdes, Montréjeau, Foix). Cependant, l’aération du relief pyrénéen est loin d’avoir été aussi poussée que dans les Alpes. Faute de puissants courants glaciaires, il y a peu de cols de diffluence à moyenne altitude et l’on trouve plus de gorges pittoresques que de larges vallées au parcours facile.

C’est encore plus vrai pour les Pyrénées sèches qui correspondent au versant sud, deux ou trois fois plus large que le nord, et au tiers oriental de la chaîne. Ici l’empreinte glaciaire quaternaire a marqué seulement la haute montagne, dont les massifs granitiques recèlent de beaux ensembles lacustres (Maladetta, Encantats, Carlit), mais les langues de vallées ne dépassaient pas 20 ou 30 km de longueur. Aujourd’hui ce milieu, caractérisé par la sécheresse, est peuplé de chênes verts jusque vers 800-1 000 m d’altitude et souvent par un matorral buissonnant plus ou moins dégradé, au-dessus duquel se retrouvent des hêtraies et surtout des pinèdes. La maigreur du couvert végétal favorise les ravinements, aussi les cours d’eau des Pyrénées sèches ne coulent pas à plein bord comme les gaves ou les nestes du versant atlantique mais divaguent sur de larges lits de galets.

Le caractère massif des Pyrénées ne tient pas qu’à la faiblesse de l’érosion glaciaire. Il est dû également à leur structure géologique, au faible volume des affleurements de roches tendres. Contrairement aux Alpes françaises où les massifs anciens incorporés dans la chaîne sont peu étendus, la zone axiale primaire va du pic d’Anie à la Méditerranée en s’élargissant vers l’est. S’y ajoutent les massifs nord-pyrénéens, aussi peu pénétrables, et les massifs basques, peu élevés mais aux gorges étroites et sinueuses (Bidassoa, Nives). Dans la zone nord-pyrénéenne, on retrouve bien les barres calcaires rigides et déliées des Préalpes mais pas les longues dépressions argilo-marneuses. Au sud, sierras intérieures et sierras extérieures verrouillent chaque vallée par des défilés grandioses, des gargantas étroites, accentuant l’isolement de la chaîne principale: el Pirineo . Aux deux extrémités seulement, un style tectonique plus cassant, en marqueterie, a fait naître des dépressions, des fossés d’effondrement où les roches tendres d’âges divers (Trias supérieur et flysch à l’ouest, molasses tertiaires à l’est) ont été largement érodées. On peut citer les fossés d’Ossès et de Cize traversés par la Nive et, dans les Pyrénées orientales: le Capcir, la Cerdagne, le Conflent et l’Ampurdan, dominés par de lourds massifs aux crêtes aplanies (Campcardos, Carlit, Puigmal, pla Guilhem, etc.).

3. Géographie humaine

Les communautés de vallée

Le compartimentage des Pyrénées, l’isolement de chaque vallée par rapport aux voisines ont pesé sur l’évolution des sociétés pyrénéennes et accentué leur particularisme. Dans beaucoup de vallées se sont organisées, dès le Moyen Âge, des unités économicopolitiques qui rassemblaient les villages en vue de l’utilisation collective des ressources naturelles: pacages, forêts, eaux, minerais. Sur le versant français, la gestion de ces biens appartient maintenant à des syndicats intercommunaux (Cize, Soule, Ossau...) tandis que l’organisation administrative subsiste parfois, dans les Pyrénées navarraises notamment, calquée sur le modèle ancien (valle de Baztán). Les vallées d’Andorre, État semi-souverain, sont un reliquat de ce passé lointain. Ce système a perpétué, en plein XXe siècle, des modes d’exploitation extensive avec la conservation de vastes étendues de pacages peu productifs. Cependant, l’émergence d’une population agricole progressiste a modifié le paysage, depuis les années soixante, par défrichement des landes (Pays basque de France), par reboisement sur les fortes pentes (Guipúzcoa, Navarre), par irrigation des basses terres çà et là en Aragon et en Navarre.

Élevage et polyculture

L’extension du territoire exploité aux dépens des terres communes n’est vraiment sensible que dans le Pays basque de France, où beaucoup d’agriculteurs ont pu doubler leurs surfaces de labours et de prairies grâce à des baux à long terme. Ici, l’élevage ovin laitier procurant des revenus substantiels a été le moteur de cette révolution fourragère. Si les fins de la collecte, exclusivement dévolue à la fabrication du Roquefort jusqu’en 1975, ont changé, si les entreprises aveyronnaises ont en partie cédé la place à d’autres affaires ou à de petites coopératives d’avenir incertain, le doublement de la production de lait prouve la vitalité du système (400 000 brebis dans le département, dont les quatre cinquièmes en Pays basque). Plus encore, le paysage et la relative santé démographique des cantons ruraux montrent un espace exceptionnel dans les Pyrénées où, loin d’être abandonnée, la montagne est mieux entretenue qu’auparavant, bien que le nombre des paysans ait, comme partout, beaucoup diminué. Les brebis sont presque partout présentes, mais d’autres élevages se sont maintenus et modernisés... Comme dans les pays sous-pyrénéens, des élevages laitiers sont insérés dans les réseaux de collecte industrielle coopératifs ou capitalistes. Dans les collines et la montagne basques, deux types d’élevage coexistent dans les exploitations: soit brebis laitières et vaches «à viande», soit vaches laitières prédominantes en ateliers de 20 à 50 têtes et quelques vaches à viande. Brebis laitières, vaches à viande, génisses et quelques milliers de chevaux utilisent en nombre croissant les pacages d’altitude, mais, dans les cabanes d’estivage desservies par un réseau routier moderne et partant rénovées, on ne fabrique plus de fromages fermiers qu’en fin de traite, les routes permettant de prolonger la collecte industrielle.

Les grands troupeaux ovins du versant sud (1 million de têtes en Aragon, 600 000 en Navarre, 400 000 en Catalogne) ont moins de liens avec les exploitants agricoles enracinés dans les vallées. Ils continuent de transhumer entre les pacages de la montagne et les garrigues ou les chaumes du bassin de l’Èbre où ils passent l’hiver. Mais la jachère bisannuelle (barbecho ) disparaît rapidement et les terres irriguées s’étendent dans le bas pays, de sorte que l’élevage ovin montagnard extensif cède progressivement la place à l’élevage hors-sol des granjas . Les ruines des bergeries (corrales ) qui parsèment le piémont méridional en témoignent.

Dans le reste des Pyrénées, en France, règne une extrême diversité au niveau des exploitations. La collecte laitière dans les grandes vallées concerne à la fois des producteurs spécialisés et des éleveurs à temps partiel, ceux-ci s’orientant plutôt vers l’obtention de veaux expédiés en Italie ou finis sur place pour la boucherie. Entre les fonds de ces vallées (Gave de Pau, Garonne, Salat, Ariège), où se maintient une activité agro-pastorale vivante et diversifiée, et la haute montagne, où subsiste, non sans lacunes, un estivage de bétail non laitier, la moyenne montagne, lieu des petits villages accrochés aux grands versants sur des terroirs exigus, a connu un déclin apparemment irrémédiable avec abandon et désertification dont le Couserans, en Ariège, est l’exemple le plus dramatique. L’arrivée des «néo-ruraux», écologistes ou déçus de la vie urbaine, réanime quelques hameaux, mais ceux-là ne peuvent faire reculer friches et broussailles envahissantes, car leur nombre (de 1 500 à 2 000 en Ariège) ne compense pas leur impécuniosité qui les prive du soutien du machinisme agricole.

En effet, malgré la très large prédominance, sur le versant atlantique, des surfaces toujours en herbe, il est peu d’éleveurs qui ne soient aussi des cultivateurs sur une superficie allant de 1 à 10 et même 15 hectares selon le relief et la taille des exploitations. De ce côté des monts, le maïs l’emporte largement, consommé sur place dans les petites exploitations par les porcs et la volaille, collecté dans les exploitations plus importantes. Sur le piémont basque et béarnais, la production de maïs hydride de semence tient une place de choix. Vers l’est, à partir de la Garonne, le blé et l’orge entrent dans cette production céréalière. Il faut arriver aux dépressions et vallées du Roussillon pour retrouver une économie un peu différente, soit par la place des céréales (Cerdagne), soit par l’importance des vergers spéculatifs (poires, pommes, cerises) du Conflent et du Vallespir, annonçant déjà les systèmes méditerranéens.

Le versant de l’Èbre, encore plus sec, a perdu sa spécialisation ovine qui reste l’affaire d’entrepreneurs sans terre, et un élevage laitier s’est développé avec l’amélioration du réseau routier dans les vallées aragonaises et catalanes. Sur les interfluves entre le piémont et la haute montagne, les espaces que la forêt n’a pas repris gardent des éléments anciens: blé, vigne, amandiers plutôt qu’oliviers à la limite de leur aire de culture, tout cela sur des terroirs aménagés en terrasses.

Paradoxalement, c’est ici que les bois ont fait le plus de progrès en reconquérant les espaces dévastés naguère par la transhumance ovine: 100 000 hectares en vingt ans. En Navarre, cependant, la forêt était loin d’avoir reculé comme sur le versant français, protégée par son étendue et son éloignement des lieux habités. Des deux côtés, les résineux, exotiques ou non (pins divers, sapin de Douglas), reprennent le terrain perdu par les sapins décimés pour la mâture aux XVIIe et XVIIIe siècles. Reste, en France, à développer les filières du bois, mal soutenues par des fabrications fluctuantes de meubles et par la seule papeterie de Saint-Gaudens qui utilise les feuillus.

Déclins et mutations

La modernisation de l’agriculture accélère l’exode rural faute d’activités de substitution. Là où elles ne sont pas apparues, le dépeuplement amorcé par une forte émigration traditionnelle est devenu catastrophique: Massat, en Ariège, avait 8 901 habitants en 1843 et 643 en 1982. Dans ce canton, la population ne représente plus que 3 p. 100 de celle de 1843. Sur les deux versants, la mortalité l’emporte sur la natalité (canton de Castillon, Ariège: 26 p. 1000 et 5 p. 1000) sous le double effet du vieillissement de la population et du célibat masculin. En Ariège, la moitié des exploitants n’ont pas de successeur et, en Aragon, des municipios entiers, rachetés par les services forestiers, ont été rayés de la carte administrative.

Le tourisme n’a renversé le cours des choses que dans la montagne catalane, où Barcelone et ses satellites (plus de 5 millions d’habitants) inondent en fin de semaine les plus grandes stations de ski de la chaîne (La Molina...). Au nord, ni Toulouse ni Bordeaux ne peuvent compenser le fait que les Pyrénées sont plus éloignées de Paris que les Alpes françaises, qui reçoivent dix fois plus de clients. Pourtant, à côté de quelques stations moyennes (Gourette, La Mongie, Saint-Lary) ont surgi une trentaine de petits centres égrenés de la Pierre-Saint-Martin à la Cerdagne. L’Espagne, de Candanchú à Nuria, n’en compte qu’une quinzaine. Plus soutenu, avec des saisons qui s’allongent, le thermalisme connaît un regain de faveur. Parmi la vingtaine de stations françaises, seules Amélie-les-Bains, Luchon, Cauterets, Ax-les-Thermes reçoivent chacune plus de 10 000 curistes par an. Étoile de première grandeur, Lourdes, avec ses 3 à 4 millions de pèlerins ou curieux, éclipse le reste de ces activités, y compris celles des vallées d’Andorre, où la population (estimée à 61 900 habitants en 1993) a sextuplé depuis 1960 sous l’effet du commerce frontalier associé au tourisme d’hiver et d’été.

L’industrie, à peu d’exceptions près, reste sur ses positions anciennes. L’équipement hydroélectrique est très poussé sur les deux versants mais ne doit pas faire illusion: 2 millions de kilowatts de puissance installée en France, c’est le cinquième de celle des Alpes françaises et, du fait de nombreuses très hautes chutes (Pragnères; Portillon, 1 336 m), la production est relativement plus faible: 6 milliards de kilowattheures (un sixième des Alpes). Les Pyrénées espagnoles, en revanche, avec leurs énormes barrages-réservoirs, les pantanos (3,5 milliards de mètres cubes stockés), constituent la pièce maîtresse de la production hydroélectrique de la péninsule (1,5 million de kilowatts).

Une grande part de cette énergie est exportée malgré les usines d’aluminium (Sabiñanigo en Aragon; Lannemezan; Auzat, Sabart et Mercus en Ariège) et de trop rares usines d’électrochimie: Pierrefitte, Beyrède et Marignac au nord, Monzón en Aragon. Les industries du textile et de la chaussure, très peu concentrées, survivent à grand peine. Les tissages de laine de Lavelanet, les usines cotonnières du haut Ter en Catalogne n’occupent pas 10 000 salariés, la sandale et la chaussure encore moins (Hasparren, Mauléon, Oloron). Le seul foyer industriel important et bien vivant, c’est le Guipúzcoa, groupant à lui seul plus de la moitié des travailleurs pyrénéens de l’industrie: mécanique, électrotechnique, chimie, papeterie, etc.

Cette situation explique que les centres urbains proprement pyrénéens soient peu nombreux et petits. Les principales villes ont grandi sur le piémont et pas dans la chaîne, pas même sur sa bordure. Bayonne, Pau, Tarbes, Perpignan, Pamplona, Llerida ne sont pas des villes de la montagne malgré les désignations administratives. Les 300 000 habitants de San Sebastián peuvent difficilement être rattachés à la population des Pyrénées. Il ne reste plus alors que des petites villes, les plus peuplées en Guipúzcoa: Eibar (40 000 habitants), Hernani, Tolosa, Mondragón; les autres isolées dans les vallées du Nord ou à leur débouché: Oloron, Lourdes (18 000 habitants), Saint-Gaudens, Pamiers, Foix; les plus rares sur le versant sud: Jaca, Andorra-la-Vella (26 000 habitants), Ripoll, Olot...

Au total, les perspectives du monde pyrénéen seraient peu encourageantes si l’on ne voyait que le dépeuplement de l’Ariège ou du haut Aragon, les voies ferrées délaissées, les mines les plus riches qui se ferment. Mais l’exemple de la basse Navarre avec ses campagnes en pleine santé, celui du Guipúzcoa fort de ses industries variées, celui des vallées catalanes que le tourisme sauve de l’abandon montrent que le pessimisme doit être tempéré, même dans les Pyrénées où les points noirs ne manquent pourtant pas.

Pyrénées
(paix des) paix conclue (1659) par Mazarin (France) et don Luis de Haro (Espagne) dans l'île des Faisans, au milieu de la Bidassoa (fleuve des Pyr.-Atlant.). L'Espagne cédait à la France le Roussillon et de nombreux territoires et villes des Pays-Bas espagnols (de l'Artois, de Flandre, de Hainaut, du Luxembourg).
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Pyrénées
chaîne de montagnes de France et d'Espagne, située entre l'océan Atlantique à l'O. et la Méditerranée à l'E. Chaîne apparue à l'ère primaire, soulevée à nouveau au tertiaire, les Pyrénées présentent trois zones longitudinales: une zone axiale, cristalline, où se trouvent les princ. sommets (pic d'Aneto, 3 404 m, en Espagne; pic Vignemale, 3 298 m, en France); une zone nord-pyrénéenne, dont les terrains sédimentaires forment deux séries de rides plissées; une zone sud-pyrénéenne, divisée en deux vastes anticlinaux. Montagnes massives, les Pyrénées ne sont franchissables qu'à l'O., région moins élevée, et en bordure de la Méditerranée (col du Perthus, 290 m). Le climat, doux et humide à l'O. et sur le versant français, devient rigoureux au centre et prend des nuances continentales sur le versant espagnol. Les rivières ("gaves" dans les Pyrénées centrales) sont presque toutes perpendiculaires à l'axe de la montagne. Auj., la pop. a émigré vers les villes du piémont (Pau, Pampelune, Tarbes). L'aménagement hydroélectrique n'a pas fixé de grande industrie. Le tourisme (Lourdes) et le thermalisme sont vivaces. (V. aussi basque [Pays].)

Encyclopédie Universelle. 2012.

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